La république dHaïti est plus dans nos mémoires
que dans nos curs, on se souvient davantage de la période coloniale
que des ouragans qui dévastent régulièrement le pays.
Il vit pourtant toujours dans lespoir de ne plus être le plus
pauvre des Amériques, avec son insécurité et le drame
de la faim qui avait provoqué des émeutes au printemps 2008.
Peu de touristes, plus nombreux sont ceux qui cèdent aux appâts
de la république dominicaine, sa voisine, alors que leur géographie
est la même et que sa langue nest plus la notre.
Nous envoyons régulièrement livres et brochures à
luniversité détat par lintermédiaire
du Dr Cadet afin que la formation des étudiants en ophtalmologie puisse
se faire en langue française. Cela va du manuel danatomie aux
livres les plus récents. Jai toujours été
frappée par la culture des Haïtiens.
Il y a deux mois, nous avons du à la générosité
du groupe Vedici qui gère deux cliniques à Angoulême
de pouvoir leur envoyer un phacoémulsificateur Alcon, avec huit pièces
à main et un peu de consommable, le tout en bon état. Ce sont
les pièces à main qui font la valeur de lappareillage
sans quoi nous récupérerions toutes les machines usées
de France et de Navarre. Le faire voyager nest pas simple, il faut
payer une caisse en bois traitée et le transport en conteneur, 25
jours de mer, pour 2 000 euros environ.
Et puis ? La phacoémulsification revient tellement plus cher
que lextraction manuelle, elle exige des tubulures et des cassettes,
des implants pliables, du visqueux, un laser Yag pour les capsules
Sans
compter un bon microscope qui nest pas facile à trouver et encore
moins à déplacer.
Qui paiera ? Peut-on désirer des biens que le sort ne nous accorde
pas gratuitement. Jean Racine, en lisant sa bible latine avait souligné
cet endroit : Et tribuit eis petitionem eorum. Et il se lest
rappelé quand il a mis dans la bouche dAricie ces mots qui font
pâlir limprudent Thésée :
"Craignez, seigneur, craignez que le ciel rigoureux
Ne vous haïsse assez pour exaucer vos vux.
Souvent dans sa colère il reçoit nos victimes :
Ses présents sont souvent la peine de nos crimes."
Donner nest pas un but, chaque geste pris isolément cest
comme la photo dune pellicule qui ne fera jamais un film et la saga
de la santé est une histoire sans fin.
Bonnes Missions.
Présidente d'Ophtalmission
Dr Lina Dutca
Novembre 2009